J'ai eu l'opportunité de faire une présentation à University of Sussex, Angleterre, où j'ai souligné que la migration irrégulière n'est pas simplement un acte désespéré ou un suicide, comme on le décrit souvent dans les médias. Au contraire, c’est une forme d'activisme contre les politiques de l'apartheid mondial.
Ce que nous devons comprendre, c'est que l'immigration clandestine n'est pas une maladie en soi. Elle est un symptôme. Le symptôme d'une maladie mondiale : un ordre international inégalitaire qui divise le monde entre ceux qui ont accès à la prospérité et à la mobilité, et ceux qui en sont privés, simplement à cause de leur lieu de naissance, de leur race ou de leur statut économique. C’est une racialisation de la mobilité internationale.
Des chiffres alarmants révèlent l'ampleur de ce phénomène. Au cours de l’année, des milliers personnes ont débarqué aux îles Canaries par bateau, au péril de leur vie. Ces jeunes n'entreprennent pas ce voyage parce qu'ils n'ont aucun espoir. Ils migrent parce qu'ils veulent revendiquer un futur que le système actuel leur refuse. Leur migration est un acte de défiance face à un monde qui les considère comme indésirables, marginalisés par la simple condition de leur naissance.
En présentant mes recherches, j'ai mis en avant l'idée que ce n'est pas du suicide. C’est un acte de résistance contre un apartheid mondial moderne. La jeunesse d'aujourd'hui refuse de se laisser enfermer dans les frontières d’un monde qui ne leur offre aucune perspective. Ils réclament leur droit à la dignité, à la liberté, et à l'égalité.
Nous devons changer notre perception et cesser de pathologiser la migration clandestine. Il est temps de reconnaître que ces jeunes se battent pour plus qu'un simple passage vers une autre terre. Ils se battent pour un monde plus juste.
La déclaration du PM Ousmane Sonko résume bien cela : « Vous avez en face de vous … une jeunesse décomplexée qui a les mêmes soifs de liberté, de progrès, de démocratie, de développement que vos propres peuples et ils ne pourront jamais plus accepter la domination sous quelque forme que ce soit. Ils ne pourront plus accepter l’exploitation sous quelque forme que ce soit »
Le monde doit ouvrir les yeux et agir, car l'injustice qui les pousse à partir est une injustice qui nous concerne tous.
Mamadou Sanghare
University of Sussex